Critique : Maggie

maggieDe Henry Hobson avec Arnold Schwarzenegger, Abigail Breslin et Joely Richardson

La note des Cinévores : 3étoiles

Au détour d’une filmographie largement consacrée à l’action, Arnold Schwarzenegger s’est autorisé quelques savoureuses incartades. On l’a connu enceint dans Junior ou nounou de choc dans Un flic à la maternelle. Dans Maggie, le comédien d’origine autrichienne s’est éloigné encore plus de sa zone de confort grâce à un rôle tout en intériorité. Celui de Wade Vogel, un père de famille sans histoire à la mine aussi triste que le patelin cendré où il vit avec sa famille. Chemise à carreaux ample, pantalon un brin informe, petite barbe… On est loin de ses accoutrements habituels, qui célèbrent généralement sa carrure de bodybuilder. Aux oubliettes donc Terminator, Predator, Gouvernator et autres pectoraux saillants maculés de suie. Pur film de genre, Maggie permet cette fois à Schwarzie de jouer sur une partition très subtile, le dévoilant plus touchant que jamais dans un registre où on ne l’attendait pas. Fort d’une expressivité totalement inespérée, il parvient à transmettre toute la détresse d’un père forcé de faire face à la maladie de sa fille (excellente Abigail Breslin). Laquelle a été mordue par des zombies et condamnée à une lente et inexorable transformation. Si l’émotion marche à ce point, c’est parce que le scénario –  ayant longtemps figuré dans la fameuse blacklist des meilleurs scripts non financés par Hollywood – brise les codes du film de zombie lambda. Cette fois, la contamination ne revêt ni le fun de Bienvenue à Zombieland ni l’effroi de 28 jours plus tard. Elle prend plutôt la forme métaphorique d’un cancer métastasique qui décharne peu à peu les êtres aimés. Sans pour autant marquer d’une pierre blanche un genre balisé, le cinéaste Henry Hobson, dont c’est le premier film, parvient là à se détourner avec les honneurs du tout-venant – effluves sanguinolentes notablement radiées – et confère une dimension humano-psychologique assez inédite à son sombre tableau. L’unité de lieu est en effet réduite à son minimum syndical ; on dépasse rarement les contours d’une bourgade en décrépitude (le film a été tourné à la Nouvelle-Orléans), traversée d’ombres divagantes et lestée par une atmosphère purement méphitique. On retiendra surtout les larmes d’Arnold Schwarzenegger, sa fragilité et sa volonté permanente, dans un monde en plein chaos, de privilégier le dialogue pacifié à la violence aveugle. Un délicieux comble au regard d’une carrière où les coups ont fusé tous azimuts.

Mehdi Omaïs