De Tate Taylor avec Chadwick Boseman, Nelsan Ellis et Viola Davis
Dans la famille des films délibérément Oscar-friendly, je demande Get on up, le biopic consacré à la vie tumultueuse du chanteur James Brown. Produite entre autre par le légendaire Mick Jagger, lequel ne se cache pas d’avoir piqué deux-trois déhanchés au Parrain de la Soul, cette fresque musicale à la narration entortillée constitue en quelque sorte un ABCdaire utile aux amateurs du B.a.-ba. Ceux qui espéraient une œuvre grinçante et rageuse, en ombre et lumière, comme le projet le promettait à ses balbutiements, peuvent ranger les micros. En cause ? L’extrême sagesse du scénario qui passe sous (quasi) silence le tempérament frondeur de son sujet pour n’en proposer qu’une représentation sinon édulcorée, du moins insipide. Alors oui, James Brown, enfant de la Grande Dépression, a eu un début de vie mortifère en Caroline du Sud. Abusé sexuellement, abandonné, bafoué, humilié, passé par la case prison, Monsieur Dynamite a essuyé d’atroces obstacles avant que sa voix ne le porte jusqu’à la canopée des charts. Un succès foudroyant auquel il n’était peut-être pas assez préparé et qui a catalysé ses accès de colère et d’égocentrisme. Pour mettre en image ce personnage intéressant vers lequel le cinéma a longtemps lorgné, la production a réquisitionné Tate Taylor. Le réalisateur de La couleur des sentiments, probablement tributaire d’un cahier des charges impitoyable, porte hélas un regard affreusement désincarné sur Brown et se contente de filmer sans aspérité, sans art, privant son labeur d’une quelconque forme d’émotion. Reste la prestation très convaincante du jeune Chadwick Boseman, étonnant de mimétisme et d’énergie, qui devrait lui ouvrir de nombreuses portes.
Mehdi Omaïs
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